Jeanne DEROIN
(1805-1894)

Une féministe engagée dans la défense des droits des femmes et des travailleur.e.s

Le féminisme de Jeanne DEROIN selon l’historienne américaine Joan W. SCOTT : 

« Le féminisme de Jeanne Deroin qui met l’accent sur les devoirs de la citoyenne, se veut une alternative à l’individualisme. C’est le couple qui est “l’individu social”, dans une dualité féconde, celle de l’homme et de la femme, qui amène à une valorisation de la maternité comme travail social, productif (la question du travail est centrale en 1848). L’image des femmes “mères de l’humanité” revient souvent sous la plume de Jeanne Deroin ; elle pose par exemple la question de l’impossible transmission du nom des femmes à leurs enfants […] Mais à l’inverse des discours dominants du XIXe siècle, pour qui la fonction maternelle est incompatible avec la citoyenneté politique, Jeanne Deroin voit dans la maternité un argument fort pour la reconnaissance des femmes comme individus porteurs de droits et de devoirs. »

Peinture de l'artiste français Honoré Daumier (1808-1879) intitulée Le soulèvement (l'emeute) avec Jeanne Deroin en son centre, c. 1848.
Jeanne Deroin (en haut). Gravure anonyme de 1848.

Première femme française à s'être présentée aux élections législatives

Née le 31 décembre 1805 à Paris, morte le 2 avril 1894 à Londres ; ouvrière lingère puis institutrice, directrice de journaux féministes : animatrice, sous la Deuxième République, d’associations ouvrières qui furent l’ébauche des syndicats.

Avec Désirée Gay, Pauline Roland et Eugénie Niboyet, elle fonde la « Société de la voix des femmes » qui développe leurs pensées et théories féministes.

Entre juin 1848 et août 1849, elle publie la revue l’Opinion des femmes avec Désirée Gay et Jean Macé, et signe avec ce dernier une déclaration pour l' »Association fraternelle des démocrates socialistes des deux sexes, pour l’affranchissement politique et social des femmes ».

Le 13 mai 1849, elle se porte candidate à la Législative, en étant la première femme à le faire, bien qu’elles n’aient pas encore acquis le droit de vote. Elle anime sous la IIe République des associations ouvrières de production – AOP – ancien nom des SCOP. Partageant la plupart des combats, et prenant diverses initiatives avec Pauline Roland (Association des Instituteurs socialistes, Union des Associations, etc.), c’est dans une lettre aux ouvrières en confection de l’AOP Ricroch qu’elles qualifient Limoges de « ville sainte du socialisme ». Après l’écrasement des manifestations de juin 1848, son projet d’ « Union des Associations » (adopté par près de cent associations) , se propose de répartir équitablement le produit du travail de tous les groupes associés en proportion des besoins des membres et de leur famille.

Après le coup d’État de 1851, alors que Pauline Roland est arrêtée et « transportée » en Algérie, elle s’enfuit en Angleterre où elle meurt le 2 avril 1894.

« Depuis l’origine du monde il y a des esclaves et des maîtres, des opprimés et des tyrans, des privilèges de sexe, de race, de naissance, de caste et de fortune, et il y en aura toujours tant que vous refuserez de pratiquer la fraternité envers celles que Dieu vous a données pour soeurs et compagnes. »

Jeanne DEROIN, L’Opinion des femmes, 1849, texte adressé à Proudhon

Réalisation de Lucille MAUREL pour PR2L, mars 2022. Avec le soutien de Baptiste RAMAS et des bénévoles de l’assocation.